samedi 19 décembre 2009

[Presse policière] Allemagne : la violence d’extrême-gauche se radicalise

Voitures en flammes, affrontements de rue, cocktails Molotov : la radicalisation des activistes d’extrême-gauche inquiète les autorités.

Le nombre d’actes de violence imputables aux «autonomes», une mouvance d’extrême-gauche hétérogène qui réunit militants antifascistes, anarchistes, punks et membres du «Schwarzer Block» (Black Block) voulant en découdre, a bondi en 2009, selon des chiffres provisoires de la police fédérale (BKA) divulgués par la presse jeudi.

Sur les neuf premiers mois de l’année, la progression est de plus de 50% par rapport au même intervalle l’an dernier.

Et les «autonomes», qui sont entre 5000 et 6000 dans le pays, semblent avoir franchi une étape dans la radicalisation, avec des actes davantage planifiés et plus symboliques, constatent les spécialistes.

«Anti-yuppies»

Les attaques «anti-yuppies», comme faire brûler une Porsche ou s’en prendre à un immeuble de luxe, sont en vogue. Une bombe artisanale fabriquée avec des cartouches de gaz a ainsi visé un coûteux projet immobilier à Berlin en octobre.L’autre tendance notable est la nette augmentation des agressions visant des policiers, avec entre autres trois tentatives d’homicide depuis le début de l’année. Début décembre, des jeunes ont lancé des cocktails Molotov et incendié des bâtiments et voitures de la police et des douanes à Hambourg et à Berlin.Ces actes ont une intensité «comme on n’en avait plus vue depuis la terreur des années 70» avec la Fraction armée rouge (RAF), estime Christian Pfeiffer, de l’Institut de criminologie de Basse-Saxe, dans le magazine Stern.Ils ont «une proximité symbolique» avec le terrorisme, renchérit le politologue Hans-Gerd Jaschke.

Rhétorique antimondialiste

Ces actions sont souvent justifiées par des arguments piochés dans la rhétorique antimondialiste, antifasciste ou antimilitariste, constatait la présidente des services du renseignement intérieur à Berlin, Claudia Schmid, lors d’un récent colloque.«L’idée, c’est que si on fait brûler une voiture, c’est un attentat, mais si on en fait brûler 100, c’est une action politique», ironisait-elle.Berlin compte la plus importante scène «autonome» d’Allemagne avec 950 militants, «de plus en plus enclins à la violence», selon Mme Schmid. Entre 2002 et 2006, les violences d’extrême-gauche ont constamment augmenté. Et cette année, la moitié des quelque 260 voitures incendiées depuis début janvier l’ont été par des «autonomes».Les violences concernent surtout Berlin et Hambourg, deux villes où la mouvance est fortement implantée depuis les années 80, mais d’autres villes sont touchées, grandes ou petites, comme Göttingen (centre) ou Lüneburg (nord).«Berlin arrive quatrième derrière Hambourg, Francfort et Leipzig dans le classement des voitures brûlées», détaille Mme Schmid.

Jeunes femmes de plus en plus nombreuses (sic)

Un peu partout en Allemagne, les autorités constatent aussi que les jeunes femmes sont de plus en plus nombreuses à passer à l’acte.Des militants antifascistes s’étonnent à voix haute de l’arrivée d’«une nouvelle génération de jeunes» particulièrement ouverts à la violence mais peu politisés, «qui font des virées» et s’affrontent volontiers avec l’extrême-droite.L’usage de la violence est d’ailleurs objet de discussion parmi les autonomes, certains l’estimant contre-productif puisqu’il n’a pas provoqué jusque-là le débat de société souhaité.

Source: Le Matin, 18 décembre 2009.