(AFP)
STOCKHOLM — Près d'une centaine de jeunes ont attaqué un commissariat de police et provoqué des incendies, lors d'une deuxième nuit consécutive d'émeutes à Rinkeby, une banlieue défavorisée et à forte population immigrée de Stockholm, a rapporté mercredi la police suédoise.
"Ils ont mis le feu à un bâtiment scolaire (...) Ils ont essayé d'incendier le commissariat, d'autres bâtiments ainsi que des voitures, mais essentiellement ils ont jeté des pierres et des briques sur la police et les pompiers", a déclaré à l'AFP Mats Eriksson, porte-parole de la police de l'ouest de la capitale suédoise. Personne n'a été blessé, a-t-il précisé.
Trois ministres suédois dont la ministre de l'Intégration Nyamko Sabuni se sont rendus sur place mercredi. Le Premier ministre suédois Fredrik Reinfeldt a réclamé qu'il soit rapidement mis un terme aux émeutes. "Les conséquences risquent de devenir très graves et (cela) pourrait affecter les habitants de Rinkeby", a-t-il dit, cité par l'agence TT.
Les violences de Rinkeby, une banlieue connue pour avoir une des plus grandes communautés d'immigrés de première ou de deuxième génération de Suède, avaient éclaté lundi soir. "Tout a débuté parce qu'un groupe de jeunes adultes s'est vu interdire de pénétrer dans une fête dans un collège. Ils se sont énervés et ont commencé à jeter des pierres à travers les vitres de l'école", a raconté M. Eriksson.
Les jeunes, jusqu'à une centaine selon la police, s'en sont ensuite pris au commissariat de police où ils ont brisé des vitres et mis le feu à une voiture. Trois personnes ont été arrêtées avant d'être relâchées mardi.
Mardi soir, "je dirais que les choses se sont aggravées", selon le porte-parole de la police, avec l'incendie du bâtiment scolaire et de quatre à cinq voitures.
"C'est une situation extrêmement grave et qui doit cesser au plus tôt, sinon cela va continuer à empirer", a averti M. Eriksson."
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Les violences de Rinkeby inquiètent les politiciens suédois à quelques mois des élections
AFP/FREDRIK PERSSON
Pas moins de trois ministres se sont succédés mercredi 9 juin à Rinkeby, dans la banlieue nord-ouest de Stockholm, la capitale suédoise, après les émeutes qui ont secoué pendant deux jours ce quartier à majorité immigrée. Jeudi matin, le calme semblait provisoirement revenu après une nuit sans incident notable. Une dizaine d'incendies criminels ont été allumés à Rinkeby mais également à Tensta, une banlieue voisine. Personne n'a été blessé.
A Rinkeby, entre cinquante et cent jeunes seraient impliqués dans les incidents de ces dernières nuits. Ils ont jeté des pierres contre les policiers, contre les gens qui tentaient de les arrêter et contre les pompiers arrivés pour maitriser les incendies. L'un d'entre eux visait un commissariat. Un autre incendie a complètement détruit Rinkebyakademin, l'Académie de Rinkeby, un centre d'aide pour les jeunes en difficulté où ces derniers pouvaient rencontrer des mentors du monde de l'entreprise.
Selon son responsable, il est sans doute peu vraisemblable que son établissement, mitoyen d'une école, ait été visé en tant que tel. Plusieurs voitures ont également été incendiées. La police a annoncé qu'elle déployait désormais une présence permanente, jour et nuit, et que des policiers en civil seraient également affectés à la zone. Trois jeunes ont été interpellés à l'issue des violences nocturnes. Deux d'entre eux ont été relâchés mercredi mais la police compte mener d'autres interpellations grâce à l'analyse des caméras de surveillance.
Vu d'ailleurs, l'ampleur des émeutes peut sembler toute relative. Mais à l'échelle suédoise, elle est grave car elle intervient en période électorale et que pour la première fois depuis vingt ans, un parti d'extrême-droite, Sverigedemokraterna (Les démocrates suédois), pourrait faire son entrée au Parlement lors des élections législatives de septembre prochain, risquant ainsi de bouleverser tout l'équilibre politique du royaume. Le parti d'extrême-droite mise une grande partie de sa campagne sur la lutte contre la criminalité et l'immigration. Du coup, les responsables du gouvernement de centre-droit ont réagi en force, avec trois ministres détachés sur place et des déclarations du premier ministre lui-même.
L'ORIGINE DES VIOLENCES INCONNUE
"Les incidents de Rinkeby sont un signe que la société ne fonctionne pas bien pour tout le monde", a déclaré le premier ministre conservateur Fredrik Reinfeldt. "On ne peut pas s'attendre à ce qu'uniquement les autorités ou les politiciens règlent tous les problèmes de société. Il en va de la responsabilité de la société civile, des parents et de chaque individu pour régler cela localement", a pour sa part lancé Nyamko Sabuni, ministre libérale de l'intégration, l'une des trois ministres à avoir fait le déplacement en banlieue.
Rinkeby est l'une des banlieues suédoises les plus débattues de Suède, à l'égal de Rosengård, un quartier de Malmö, principale ville du sud du pays, où 60 % des habitants sont d'origine étrangère. Rosengård avait été le théâtre d'émeutes à répétition il y a deux ans et les autorités suédoises craignent aujourd'hui que les deux soirées d'incidents à Rinkeby ne soient que les prémisses d'une nouvelle vague de violence qui pourrait s'étendre à d'autres villes. Si le nom de Rinkeby est depuis longtemps associé à ghetto immigré en Suède, le quartier, justement à cause de sa réputation, a fait depuis des années l'objet d'attentions particulières. Pour certains, Rinkeby est un quartier qui se bat pour se sortir de cette spirale négative. L'académie, le bâtiment qui a brûlé, en est un exemple. Les autorités municipales ont d'ailleurs aussitôt annoncé qu'elle serait reconstruite.
L'origine des violences de ces derniers jours est encore incertaine. Selon des sources évoquées par la presse suédoise, il pourrait s'agir d'une bagarre qui aurait dégénéré lors d'une fête lundi soir. Certains jeunes se seraient vu refuser l'entrée, la police aurait été appelée, et tout aurait ensuite dérapé après l'interpellation des individus. Des jeunes auraient en revanche raconté avoir réagi à cause d'une intervention brutale de la police envers une élève et parce qu'un policier aurait tiré un coup de feu en l'air.
Depuis deux jours, de nombreux intervenants à Rinkeby se sont inquiétés de la spirale dans laquelle la banlieue risquait d'être entrainée. Outre les heurts avec la police, des responsables locaux mettent surtout l'accent sur l'inquiétant chômage des jeunes, phénomène général en Suède, mais particulièrement sensible dans les quartiers immigrés comme Rinkeby.
(LeMonde.fr)