À 19h30, malgré la pluie, nous sommes bien 250 à nous retrouver une fois de plus sur la place de la Victoire. L’allumage d’un fumigène et de quelques flambeaux maison (très réussis) marque le départ du cortège. La pluie s’arrête quand on s’engouffre dans le cours de la Marne en direction des Capucins/Saint-Michel, les quartiers dits «noirs» et «arabes» (en vérité le dernier quartier encore populaire de la ville, qui subit un lent processus de gentrification).
Quelques personnes se sont organisées pour faire de l’affichage (et du tag ?) le long de la manif, mais les flics sont nombreux et réactifs. À chaque arrêt suspect la BAC s’approche dangereusement et rapidement. C’est beaucoup de risques pour pas grand chose, tant pis, on se contentera de fumigènes, de pétards et de diff de tracts. Derrière ce sont trois ou quatre fourgons et autant de voitures de flics qui nous suivent, sans parler de celles qui sont banalisées.
La pluie a vidé les rues de ses passants, on manifeste devant des files de voitures. Tout ça est un peu tristounet mais le cortège conserve sa pêche pendant ses deux heures de déambulation. Surprise à mi-parcours : à dix mètres du sol est suspendue une grande banderole de solidarité avec les inculpés de Vincennes. On finit par arriver devant l’imposant commissariat central, c’est dans les sous-sols du bâtiment qu’est censé être reconstruit le Centre de rétention administratif de Bordeaux (le premier a brûlé il y a un an jour pour jour). Quelques bousculades gentillettes avec le rang de CRS qui nous interdit l’entrée du comico, et puis après quelques minutes de slogans, on repart groupéEs vers le centre-ville pour se disperser, touTEs un peu las.
Le bilan de cette dernière manif est un peu décevant. Elle devait marquer la fin du mois d’agitation en rapport avec la construction du nouveau CRA, et coïncider avec le début de la campagne de soutien aux incendiaires de Vincennes. Il faut croire que les conditions n’étaient pas réunies : une mauvaise météo, doublée d’une présence policière accrue, presque oppressante, empêchant toute marge de manœuvre. Il faut noter aussi une certaine lassitude après un mois à se rassembler chaque semaine aux mêmes endroits, avec les mêmes personnes, gueuler les mêmes slogans avec les mêmes banderoles…
Cependant, les badaudEs qui se sont promenéEs aujourd’hui aux alentours du palais de justice n’auront pas manqué de remarquer que le sol et les moquettes de l’agence Bouygues Immobilier sont jonchés de bris de verre. Certainement le même verre qui manque à la vitrine. Bien fait !